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mandaliayoga

La coquille, le cœur et l'âme

Dernière mise à jour : 23 nov.

Dans l'espace intérieur vers lequel nous invite la méditation, telle que je la vis, il n'y a ni précepte ni dogme. Il s'agit simplement d'être avec Soi, de s 'offrir le temps de sentir sa propre présence pour goûter la vie qui nous traverse. On la ressent dans son corps par le biais des sens, on reste ouvert et curieux à ce qui se présente dans l'instant.


La méditation nous invite à sortir de la voie du faire, de la volonté et du résultat, inculquée dès le plus jeune âge, pour s'autoriser à être tels que nous sommes.


On entre dans cet espace intérieur en osant Être. Oser être imparfait au regard extérieur, oser s'accueillir pleinement avec ses joies, ses peurs, ses souffrances, son irrationalité, sa petitesse et sa grandeur. Il n'est pas question d'emprunter le chemin d'une quelconque perfection, mais d'apprendre à percevoir la beauté de cette route tortueuse qui mène à quelque chose d'authentique. Se révéler, c'est embrasser le beau et le moins beau en nous car ils sont indissociables. C'est être honnête avec ce qui est là.


Je me suis sentie libre le jour où j'ai accueilli avec douceur et indulgence les petitesses qui me parcourent l'esprit quand la colère ou la peur font irruption. J'ai cessé de réprimer ce qui n'entre pas dans le « socialement enviable ». J'ai intérieurement dit à toutes ces choses qui me traversent : ah oui, vous êtes là, vous. Rien d'autre. Je leur ai laissé leur place en moi. C'est un cadeau de s'accueillir sans renier aucune facette, même les moins glorieuses. Quel soulagement d'être en vérité avec soi ! On ne se raconte pas d'histoire et alors on se libère d'une image idéalisée (le fameux Surmoi), d'une injonction à la performance où à la perfection.


Si je fais la liste, il y a une procrastinatrice en moi, il y a une créative, une enfant, une emmerdeuse (qui s'est beaucoup calmée depuis qu'elle s'est sentie accueillie!), une guérisseuse, une femme joyeuse et une mélancolique, une thérapeute qui a parfois trop envie d'aider, et tant d'autres. Elles ont toutes leur place et c'est à chaque fois une joie d'être en leur présence. Plus j'accompagne de personnes dans ce processus d'accueil, plus je suis capable de me l'offrir. Comme disait Winnicot, "merci à mes patients d'avoir payé pour m'instruire", j'ajouterais merci de m'avoir permis de mieux me connaître! Me connecter aux autres me montre toujours des aspects de l'humanité que je porte aussi en moi et me fait réaliser à quel point nous sommes interconnectés.


Depuis que je fais cela, que je me laisse toucher par ces aspects de moi-même et par toutes les facettes des gens que je rencontre, la vie change, presque imperceptiblement mais en profondeur.


Après de nombreuses années passées à contre-courant durant lesquelles j'ai bataillé (la bataille la plus insensée qui soit, contre ma nature) pour faire taire cette profonde aspiration à la liberté, au renouveau, à l'imprévu, qui me constitue viscéralement, j'ai accepté l'idée que le moule (socialement enviable) dans lequel je m'évertuais à entrer n'était pas faite pour moi. Mon cœur et mon âme n'y logeaient pas. J'ai pris conscience que j'abandonnais une partie essentielle de moi dans une vie qui ne me ressemblait pas, que j'abordais telle une coquille vide. Cela me demandait beaucoup trop d'énergie.


A force d'accueillir tout ce qui me traverse, j'ai appris à écouter l'essentiel en moi et à développer une confiance inaliénable en la vie. Parce que depuis que je me sens réunie, la coquille, le cœur et l'âme, la vie peut à nouveau me traverser. Je me sens pleine de vitalité, existante, alignée.


Oser être n'est pas une chose simple, et pourtant c'est si évident, si naturel. Les approches méditatives et thérapeutiques sont des outils grâce auxquels nous retraçons le chemin vers nous-mêmes, de la coquille vers l'essentiel, qui nous avons à être. Ou pour prendre une autre image chère aux yogis, du véhicule vers le conducteur. Ce faisant, nous nous libérons progressivement du poids des injonctions et des fausses contraintes qui nous éloignent de qui nous sommes.


Cet accomplissement n'est pas incompatible avec une réussite sociale, ou le respect d'une tradition, ou encore une quête de sécurité, mais il est prioritaire car il nourrit quelque chose d'existentiel en nous. Abraham Maslow, dans sa hiérarchie des besoins le décrit bien. Nous avons des besoins vitaux qui touchent à la survie physique, des besoins psycho-sociaux d'intégration et d'appartenance qui bâtissent notre identité sociale, mais nous avons aussi des besoins ontiques, sans lesquels la vie n'a pas de saveur réelle. Nourrir ces besoins existentiels est évidemment essentiel au véritable accomplissement.


Dans son livre « foutez-vous la paix », Fabrice Midal évoque s'être toujours senti différent des autres, comme un martien. Ce n'est qu'à partir du moment où il s'est accepté comme « martien », qu'il a commencé à être lui même et a trouvé sa place dans le monde. Car il n'y a rien de plus triste et de plus ridicule que de ne pas s'accepter soi-même, sans concession.


Lorsque j'ai quitté une existence sécurisante mais trop étriquée pour moi, j'ai commencé à laisser vivre ma propre forme, mes aspérités, mes particularités. Ce faisant, la vie m'accompagne, je la sens vraiment me traverser. Et cela a apaisé de nombreuses tensions. La vie est le danseur, et vous êtes la danse nous dit Eckart Tollé. J'ai plusieurs fois lu cette citation que je ne comprenais pas très bien. Aujourd'hui je sens le danseur guider mes mouvements. La vie devient comme une inspiration, une intuition, elle se déroule sous nos pas au gré de notre musique intérieure. Elle n'est pas figée, elle n'est ni sécurisée par des assurances ni contenue par un moule extérieur. La vie s'écrit, se danse, se dessine, se compose.


Je ne récuse pas les années vécues loin de mon Être intime qui enfin a pris sa place. Parce que c'est le vide intérieur et le sentiment d’incongruité qui m'ont permis de parcourir ce chemin pour me retrouver. Je finirai par cette phrase de Khaled Roumo que je trouve très inspirante, et qui m'a été soufflée par Thierry Tournebise, un homme tout aussi inspirant, dont je vous parlerai plus longuement une autre fois, La faille en soi est un chemin vers Soi. Nos difficultés sont une voie d'accès, pour revenir à nous-mêmes. Mais il faut d'abord accepter de la voir, cette faille. Et l'accueillir.

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